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Au Panamá, un «Monsieur Propre» élu après les scandales de corruption

Au Panamá, un «Monsieur Propre» élu après les scandales de corruption

Le candidat de centre gauche Laurentino Cortizo est devenu dans la nuit de dimanche président d’un pays marqué par les affaires Panamá Papers et Odebrecht. Comme lors de sa campagne, il a promis que «plus personne ne sera intouchable»..

Sous une pluie de paillettes argentées, le nouveau président panaméen Laurentino Cortizo (dit «Nito») est apparu tout sourire dans la nuit de dimanche. Le candidat du parti de centre gauche Partido Revolucionario Democrático fêtait sa victoire serrée face à Rómulo Roux (centre droit). Il a remporté la course à la présidentielle avec 33% des voix lors du scrutin à un seul tour. Des chiffres contestés par son rival, qui a lui obtenu 31% et appelle à revoir le scrutin.

Depuis la restauration de la démocratie en 1989, aucune élection n’avait connu un résultat aussi serré. Laurentino Cortizo succède à Juan Carlos Varela, du parti de droite Panameñista, non rééligible car la Constitution ne permet pas d’exercer deux mandats successifs.

A 66 ans, ce businessman a étudié à l’université d’Austin (Texas). Ses enfants sont même citoyens américains. Il a travaillé pour le secteur du bâtiment et a occupé le poste de ministre de l’Agriculture de 2004 à 2006.

Après sa victoire, Laurentino Cortizo a centré son discours sur la nécessité de nettoyer le pays de toute forme de corruption : «Plus personne au Panamá ne sera intouchable. Il y a beaucoup à faire, à reconstruire», a-t-il lancé. Un discours à l’image de sa campagne, centrée sur la corruption qui agite le pays depuis les années 80. L’Etat peine surtout à se remettre de deux scandales majeurs : les Panamá Papers et celui d’Odebrecht, une affaire de pots-de-vin qui a notamment touché l’ex-président Ricardo Martinelli.

«Fatigués par la corruption»

La stratégie de Cortizo durant la campagne visait à mettre en cause la crédibilité des partis de droite, tous deux touchés par ces scandales qui ont un impact direct sur la population. Les aides sociales peinent à atteindre ceux qui en ont besoin, les investissements internationaux se raréfient, les coupures d’eau sont fréquentes dans certaines zones.

«La population est fatiguée par la corruption», souligne Andrey Hernández, docteur en géographie urbaine-économique à l’université Sorbonne-Nouvelle et spécialiste de l’Amérique centrale. Selon un amalgame de sondages rassemblés par le Council of the Americas, la corruption est la première préoccupation des électeurs, devant la criminalité, le chômage et le coût de la vie.

Contre ce phénomène qui gangrène le système panaméen, Cortizo a insisté sur la nécessité de rendre le système bancaire plus transparent. La crédibilité de ce système est décisive si le nouveau président souhaite le retour des investisseurs étrangers. «L’un des points centraux est de restaurer la crédibilité du pays sur la scène internationale», a affirmé vendredi le porte-parole de la campagne présidentielle Juvy Cano à Al Jazeera.

Le ras-le-bol des Panaméens explique également le boom de candidats indépendants. L’un d’eux, l’avocat et activiste Ricardo Lombana, est arrivé en troisième place. Andrey Hernández est persuadé que ce boom incarne un renouveau du système politique. «Il va constituer un véritable contre-pouvoir sur la scène politique. S’il gère bien la crédibilité qu’il a gagné, il se peut qu’il gagne dans cinq ans les élections présidentielles.»

Pékin avance ses pions

Autre point saillant du mandat à venir : les relations entre le Panamá et la Chine. Le pays a déjà commencé à jouer ses cartes dans les infrastructures : «La Chine a investi dans les autoroutes, le renouvellement des ports, le canal de Panama», détaille Andrey Hernández. Ces investissements dynamisent l’économie panaméenne. Côté chinois, ils permettent de poser un pied dans la région et d’obtenir des avantages dans le domaine de l’import-export. Le Panamá a même interrompu ses relations avec Taïwan pour se rapprocher de l’Etat chinois. En décembre, 19 accords ont été signés lors de la visite du président Xi Jinping. Cortizo a lui-même affirmé vouloir continuer cette coopération commerciale avec la Chine, tout en insistant sur la nécessité qu’elle profite aux deux pays.

Côté américain, les relations sont plutôt tendues. «Nous avons besoin et nous avons demandé à ce que [les Etats-Unis] prêtent davantage attention à la région, pas juste au Panama. Pendant qu’ils ne le font pas, quelqu’un d’autre avance ses pions», a prévenu Cortizo lors d’une interview à Reuters dimanche. Pour l’instant, le Panamá n’a pas vocation à devenir un terrain de conflit entre les Etats-Unis et la Chine : «Chaque Etat a des intérêts différents, la finance pour l’un, les infrastructures pour l’autre», conclut Andrey Hernández.

 

Publié le 7 Mai 2019 par liberation.fr



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